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MICROCREDIT AUX PLUS PAUVRES-8

 

Toute chose qui montre aisément que le nombre de bénéficiaires impactés et le taux de remboursement évoqués et présentés par le Gouvernement sont faux et relèvent de la communication. Dans tous les cas, en faisant un tel arrangement avec la CCEC au détriment des intérêts de l’Etat béninois et de son peuple, le Gouvernement s’est rendu coupable tout au moins de légèreté grave si non de complicité de détournement de deniers publics

• Des crédits fictifs

La méthodologie de travail adoptée par la commission décrite plus haut a permis de déceler plusieurs pratiques et subterfuges par lesquelles des partenaires stratégiques ont introduit des listes de millier de bénéficiaires qui, à l’analyse, se sont révélées fictives. Ces pratiques sont nombreuses et de plusieurs natures notamment :

a) Le faux effectif Par cette pratique, les agents des institutions inscrivent volontairement un effectif supérieur à celui réel du groupement dans le but de détourner le crédit y afférent à leur propre compte. Ainsi, dans le registre est inscrit le faux effectif et sur la fiche des bénéficiaires le nombre réel de bénéficiaires. L’écart qui est généralement d’un effectif de dix (10) par groupement disparait au profit des agents ou responsables de ces institutions et devient ainsi de manière irrémédiable des impayés. Les cas sont légion.

b) Des origines inventées

En étudiant les listes des bénéficiaires produites par les partenaires stratégiques, il a été observé après les enquêtes de terrain que de manière consciente, les responsables ou agents de certains partenaires stratégiques ont introduit des noms en leur inventant des villages de provenance. Ainsi dans un arrondissement comme Toffo centre dans la commune de TOFFO, plusieurs groupements de femmes proviennent des villages appelés « cada, womè, ect.. » villages qui n’existent pas la commune de Toffo. Le même cas se retrouve dans la majorité des communes comme le village « avazoun » inventé pour être de l’arrondissement de Togoudo dans la commune d’Allada. Les techniques utilisées autour des villages de provenance varient d’un partenaire stratégique à un autre. Ailleurs, c’est le nom de village existant dans une autre commune peut être du même département qui sont utilisés. Les réponses données dans ces cas par les agents se résument à la mauvaise manipulation de l’outil informatique qui a permis de saisir les données. Mais toutes les vérifications faites, les noms de bénéficiaires qui auraient été parachutés ne font défaut nulle part. Par cette pratique, des partenaires ont pu créer plusieurs milliers de crédits fictifs
c) Des groupements et bénéficiaires fictifs
Les travaux de la commission ont permis de découvrir l’existence de près d’une centaine de millier de bénéficiaires fictifs introduits dans les listes en guise de justification de détournements colossaux orchestrés par des partenaires stratégiques. La pratique est simple : des noms de groupement inventés, des responsables de groupement inventés ou encore des noms d’anciens bénéficiaires ayant fini de rembourser et qui ne sont plus intéressés par le programme sont utilisés comme nouveaux bénéficiaires pour justifier l’incurie.

d) Des mises en place fictives

Les membres de la commission ont observé, en étudiant scrupuleusement les documents liés aux différentes mises en place de crédit depuis 2008 et surtout celles réalisées en 2009, que certains partenaires stratégiques ont fait état de plusieurs mises en place qui se sont révélées fictives. Le résultat de l’étude faite sur les mises en place réalisées au cours de la période allant de janvier à avril 2009 par le partenaire stratégique CCEC dans les départements de l’Atlantique et de l’Ouémé et les nombreuses vérifications de terrain, arrondissements et villages, montrent aisément l’ampleur du phénomène. Pour preuve, le

tableau ci après en fait une illustration.

partement Communes Dates de mise en place indiquées Nombre de bénéficiaires indiqués Montants indiqués Atlantique Allada 13 jan 2009 670 20.100.000 27 fév 2009 878 26.340.000 Ouidah 22 Jan 2009 975 29.250.000 Abomey calavi 18 fév 2009 1267 38.010.000 Zê 04 Mars 2009 879 26.370.000 Ouémé Bonou 04 Fév 2009 400 12.000.000 29 Mars 2009 800 24.000.000 Aguégué 18 Fév 2009 620 18.600.000 28 Mars 2009 200 6.000.000 Avrankou 03 Mars 2009 736 22.080.000 31 Mars 2009 900 27.000.000 Adjara 20 Mars 2009 883 26.490.000 Adjohoun 22mars 2009 968 29.040.000 Dangbo 04 Mars 2009 284 8.520.000 Missérété 24 Mars 2009 1207 36.210.000 Porto-Novo 17 Mars 2009 1601 48.030.000 Seme-Kpodji 25 Mars 2009 1496 44.880.000

Ces mises en place fictives introduites juste pour combler le vide qui a été volontairement créé dans les ressources du fonds de crédit sont évaluées à 418.320.000 de nos francs, juste pour la période de janvier à avril 2009 et pour deux départements. Ces ressources auraient pu servir à satisfaire 13.944 femmes en attente.

La politisation ou la tentative de politisation du Programme Lors de sa mission, la commission a observé plusieurs pratiques récurrentes qui, même si elles ne peuvent pas être lues comme la politisation du Programme, s’apparentent très fortement à celle-ci. Ces pratiques sont de plusieurs ordres notamment :

• La mise en place de crédits à la veille des élections

La commission a observé que les mises en place de crédit se sont accumulées dans les dernières semaines ayant précédé les élections communales de mars 2008. Ainsi les mois de janvier et février 2008 ont vu fleurir les mises en place dépassant les 40% de toutes les mises en place du semestre. Certaines mises en place ont même été faites la veille des élections c’est-à-dire quarante huit ou vingt quatre heures avant le scrutin et, à certains endroits, la nuit. C’est le cas de bien des mises en place incriminées dans les communes de Ouidah, d’Allada, de Toffo, de Porto Novo, de Natitingou, de Lokossa etc ...

La principale raison évoquée par les responsables des institutions partenaires qui est le calendrier préétabli ne peut cependant pas justifier les messages tendancieux du genre : « C’est x qui a pensé à vous et qui envoie ce crédit. Si vous voulez continuer par bénéficier de ce crédit vous savez ce qu’il faut faire » que propagent certains animateurs à l’occasion. De même, des mises en place ont été décriées dans les mêmes conditions à l’occasion des reprises d’élection dans certaines régions comme dans la commune de Lokossa.

Face à des pratiques semblables, il est difficile de ne pas lire des intentions de favoriser un bord donc des manipulations politiques.

• Des parrains candidats

Pour atteindre les objectifs qui lui sont fixés par le FNM, le partenaire stratégique CCEC a mis en place le système appelé parrainage. Ce système permet à des personnes ressources d’identifier et de sensibiliser des futures bénéficiaires qu’ils parrainent. Une fois le crédit mis en place, les parrains devraient contribuer au recouvrement en s’investissant dans la sensibilisation. La seule garantie du partenaire stratégique était dans ce cadre, le parrain. Dans plusieurs cas, se sont des milliers de bénéficiaires qui viennent au programme par le biais du seul parrain ou de la seule marraine.

En regardant de plus près le rôle joué par ces parrains, la commission a fait deux observations :

a) La plus part de ces parrains ou marraines, en tout cas jusqu’aux élections communales et locales de mars 2008, étaient des militants ou des personnalités très proches des Forces Cauri pour un Bénin Emergent (FCBE). La liste des parrains en difficulté de payement adressée à la commission et présentée en annexe n° le témoigne aisément.

b) Bien des parrains ont été candidats aux élections communales et locales et ont fait mettre en place les premiers crédits dans leurs arrondissements au cours des soixante derniers jours qui ont précédé les élections comme dans les communes de Ouidah, de Semè Kpodji et d’Allada.

Il apparait clairement que pour les élections communales de mars 2008 dans bien des communes, les microcrédits aux plus pauvres ont été utilisés comme un instrument politique, de campagne et de propagande au profit de FCBE.

• Responsables et animateurs des partenaires stratégiques candidats et ou agents de propagande politiques Plusieurs collaborateurs, agents et ou responsables des partenaires stratégiques, structures chargées de la mise en place et du recouvrement des crédits, se sont révélés acteurs actifs de partis politiques soit en tant que responsables, animateurs ou encore en tant que candidats aux élections. Les élections de mars 2008 en ont donné une illustration. En effet lors de la préparation de ces élections et surtout lors de l’animation des campagnes, certains agents ou responsables chargés de recueillir les dossiers des demandeurs, de leur formation et de l’accord de crédit ont fait campagne de manière active et ont sollicité le suffrage et le vote des populations dont la majorité est soit bénéficiaire ou demandeur des microcrédits. Lorsqu’on sait que la grande masse des populations vivent dans la précarité et le dénuement, il est évident qu’elles n’ont ni la maturité ni la force de résister à cette pression faite sur elles. Ici aussi, les microcrédits aux plus pauvres ont été utilisés comme instrument politique et de campagne.

• Le réseau des bénéficiaires comme handicap au recouvrement des impayés et cadre de mobilisation politique

En 2008, le Gouvernement et le FNM ont décidé de mettre en réseau les bénéficiaires du microcrédit aux plus pauvres. Il s’est agit pour ce faire d’organiser tous les bénéficiaires dans les cadres de village, d’arrondissement, de commune, de département et national. L’assemblée de tous les bénéficiaires au niveau du village ou de quartier de ville devait désigner des responsables portes parole qui les représenteront dans toutes les instances. Ces représentants désignés au niveau village et quartier de ville se sont ensuite réunis au niveau de chaque arrondissement pour désigner les responsables d’Arrondissement et ce jusqu’au niveau national. Le réseau ainsi créé et qui dispose d’organes et de responsables jusqu’au niveau national a pour objectif affiché d’organiser les bénéficiaires, de faciliter les mises en place de crédits et les remboursements.

Mais les travaux de la commission ont permis de constater que même si le réseau des bénéficiaires ainsi formé tente de jouer le rôle qui lui est officiellement dévolu, il est aussi et surtout assujetti à d’autres activités officieuses qui semblent prendre le pas sur les activités officielles. En effet, le réseau des bénéficiaires est souvent sollicité pour d’autres activités dont :

a) Des mobilisations et animations politiques

Le réseau est souvent sollicité pour mobiliser les bénéficiaires à participer à des activités politiques comme les visites du chef de l’Etat ou de la première dame ou encore la présentation de vœux au chef de l’Etat où elles sont habillées aux couleurs de FCBE portant des banderoles et scandant des slogans très favorables à une obédience politique connue. Comme cela se voit, ces différentes activités ne font pas partie du cahier de charge du réseau.

b) Des mobilisations à buts folkloriques

La commission a observé que bien des personnalités connues proches d’une obédience politique sollicitent le réseau pour mobiliser les bénéficiaires des microcrédits à des fins folkloriques. En effet, plus d’une fois déjà, les bénéficiaires des microcrédits ont été utilisés à faire le nombre et à faire de l’animation pendant des heures à l’aéroport dans le cadre de l’accueil des hôtes en visite dans notre pays. Cette utilisation du réseau n’a rien à voir avec les objectifs ayant gouverné la création du réseau.

Au-delà de ces utilisations malencontreuses qui sont faites du réseau et des bénéficiaires, les membres de la commission ont observé que mêmes les objectifs fixés aux membres du réseau ne sont pas véritablement atteints. Bien au contraire, à bien des égards, le réseau a contribué à créer plus de problèmes au programme. En effet, s’étant vus confiés la tâche de recouvrement des impayés, plusieurs membres du réseau, surtout des responsables, ont gardé par devers eux des remboursements d’impayés. Le programme s’est donc retrouvé avec des montants élevés d’impayés recouvrés devenus à nouveau impayés parce que gardés par des responsables du réseau. C’est le cas de madame ZOGBA Christine présidente département de l’Atlantique pour le réseau qui dans ce cadre, continue de devoir à ce jour au moins trois (03) million de francs cfa à la CCEC. D’autres exemples du même registre peuvent être cités.


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