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Kérékou et la trahison des intérêts du peuple béninois.(3)

 

   D - EXTRAITS DE LA CHARTE DE L’ENSEIGNANT DAHOMEEN DU SECONDAIRE ET DU SUPERIEUR

 

 

En 1972, les enseignants du Secondaire et du Supérieur de notre pays,  organisés  au sein du Comité pour l’Unité des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (CUESS) ont déclenché et conduit   de gigantesques grèves à l’issue desquelles ils ont décidé de tenir le congrès constitutif de leur syndicat de l’unité. Le  congrès qui s’est tenu les 15 et 16 Juillet 1972 a permis la fondation du SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNANTS DU SECONDAIRE ET DU SUPERIEUR (SYNAESS). Les enseignants  réunis en congrès ont doté le syndicat  d’une Charte, la Charte de l’Enseignant Dahoméen  du Secondaire et du Supérieur. Nous allons tirer quelques extraits de ce document qui s’inscrit dans la ligne  générale  des luttes  de cette époque et dans la mise en place des matériaux pour la construction de l’édifice politique.

  Qui est Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur ?

-    L’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur est un citoyen responsable dans un pays sous-développé où le peuple est en proie à la misère,  la faim, l’ignorance, conséquences de l’exploitation impérialiste ; comme tel, il ne saurait se réfugier dans sa tour d’ivoire, s’évader dans le mensonge, ou s’installer confortablement sur les gradins pendant que le fauve et l’homme s’expliquent dans l’arène.

(Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

 

Quel rapport lie l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur  au peuple ?

      Son sort est étroitement lié à celui de son peuple, il reste compromis quoi qu’il fasse, avec le peuple, et doit se sauver ou se perdre avec lui.

Dans le corps à corps gigantesque que l’Afrique vient d’engager contre la misère, la faim, l’ignorance et la honteuse exploitation de l’homme par l’homme, l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur veut avoir une place d’avant-garde. Il veut être le fer de lance du peuple dans son combat titanesque contre les forces réactionnaires d’obscurantisme, d’oppression et d’exploitation. C’est pourquoi il doit travailler chaque jour à améliorer sa compétence professionnelle, à élever son propre niveau intellectuel et sa conscience politique aux nouvelles dimensions du monde.
 (Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

Dans quelle organisation syndicale va militer l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur ?

 

   -  Mais comme travailleur, d’un pays sous-développé et néocolonial il sait qu’il n’y aura aucune solution à ses problèmes spécifiques qui ne soit liée au problème fondamental de la nation entière, lequel problème est encore essentiellement politique. C’est pourquoi il considère, pour ce qui le concerne, comme rétrograde, irréaliste et inacceptable, toute forme corporatiste de lutte syndicale, et opte résolument pour un syndicalisme révolutionnaire.   

(Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

-Syndicat d’éducateurs d’un pays sous-développé et néocolonial, le SY.NA.E.S.S. ne saurait se confiner à défendre des intérêts égoïstes d’une caste professionnelle, et il situe son action dans le cadre de la défense des intérêts fondamentaux des populations des villes et des campagnes ainsi, il est un syndicat révolutionnaire. Il n’a pas le choix !

(Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

 

  Et voici le programme, les options du SYNAESS en 14 points tels qu’il le pense pour la libération du Pays de la domination étrangère. Je ne mentionnerai que quelques-uns de ces points.  
1.    Une lutte résolue et conséquente contre l’impérialisme, le colonialisme et le néocolonialisme sous toutes leurs formes.

2Une lutte résolue et conséquente contre les agents locaux du colonialisme et du néo-colonialisme, condition sans laquelle aucune amélioration réelle et durable du niveau de vie des masses travailleuses ne saurait être possible.   

            SUR LE PLAN EXTERIEUR

3.    Une politique d’indépendance, d’unité et de dignité africaine.
  

5.    La démolition définitive des vieilles structures d’économie de traite imposée à notre pays par le colonialisme français.

6.    La reconnaissance, le respect et la défense des libertés démocratiques et syndicales, du droit de grève, des droits de l’homme tels qu’ils sont contenus dans la déclaration universelle des droits de l’homme.
  

10.    Une lutte sans merci contre les prévaricateurs et les agents véreux de la fonction publique.

 12.    Une campagne décisive de lutte contre l’analphabétisme, l’un des plus grands fléaux de nos villes et campagnes, et principal frein à tout effort de   développement et de progrès.

 14.    Une politique hardie et progressiste de réforme des programmes d’enseignement  indigestes et mal adaptés aux exigences  actuelles de notre développement.   

(Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

                                         CONCLUSION
La ligne de politique générale du SYNAESS, ligne révolutionnaire de lutte anti-impérialiste, doit être le seul guide de notre action  et de nos prises de position  pour transformer  la réalité qui nous insère chaque jour plus étroitement  et pour hâter  et assurer la libération totale , le progrès et le développement  économique  du Dahomey dans  une  Afrique  unie et maîtresse de sa destinée.
  

 (Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur/16/07/1972)

La Charte de l’Enseignant Dahoméen du Secondaire et du Supérieur  s’inscrit dans la ligne générale de l’option anti-impérialiste, anticolonialiste et anti néo-colonialiste.

Voilà l’ambiance dans laquelle nous avons vécu   en tant qu’élèves et Etudiants    au sein de l’Union Générale des Elèves et Etudiants  Dahoméens, de la Fédération des Etudiants d’Afrique Noire en France, de  l’Union Générale des Etudiants d’Afrique de l’Ouest !

Voilà l’ambiance générale  dans laquelle nous avons vécu   en tant que jeunes travailleurs  au sein du Comité pour l’Unité des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (CUESS), au sein du Syndicat National des Enseignants du Secondaire et du Supérieur (SYNAESS)!

C’est cette ambiance générale  qui a forgé notre  rêve d’adolescents, notre rêve  de jeunes  étudiants, notre rêve  de jeunes travailleurs aux côtés des autres travailleurs de notre pays.

Les élèves, les étudiants et les travailleurs  ont mené des luttes héroïques contre les méfaits de l’impérialisme, du colonialisme et du néo-colonialisme et de leurs suppôts locaux. Ils ont mené des luttes héroïques contre la domination étrangère. Au cours de ces luttes certains sont tombés victimes de la répression sauvage des gouvernants  au service de l’étranger, de l’impérialisme, du néo-colonialisme.  Ces luttes ont provoqué la chute de nombreux gouvernements, créant une situation d’instabilité politique chronique  dans le pays.

C’est ainsi que le peuple a vécu les coups d’Etat  et les renversements de régimes  de 1963, de 1965, de 1967, de 1969.

C’est dans cette situation d’instabilité politique qu’intervient le  énième coup d’Etat le 26 octobre 1972.

Les auteurs du putsch ont fini leur proclamation par les mots suivants. VIVE LA REVOLUTION ! VIVE LE DAHOMEY !

Mais ce n’était pas la première fois que les militaires proclamaient quelque chose de ce genre à l’issue d’un putsch. Déjà les jeunes cadres de l’armée qui ont renversé le général  Soglo en 1967  se proclamaient aussi révolutionnaires. Cela ne les a pas empêchés de remettre le pouvoir quelques mois plus tard à Emile Derlin Zinsou en 1968, Emile Derlin Zinsou qui sera renversé le 10 Décembre 1969.

Mais la situation de 1972 était qualitativement différente  de celle de 1967.

Tout le pays était en effet  couvert d’organisations de jeunes et de travailleurs  anti-impérialistes au niveau national comme au niveau des régions. La situation de 1972  n’était donc pas  la même que celle qui prévalait en 1967.Beaucoup d’organisations progressistes avaient pris position sur le coup d’Etat et avaient annoncé les couleurs. Face à cette situation de  défiance face à leur action qui pourtant avait été généralement bien accueillie par les populations,  les auteurs du coup d’Etat  entreprennent une série d’actions pour associer des personnes à leur entreprise.  

C’est ainsi que le 2 Novembre1972, le Gouvernement Militaire Révolutionnaire  invite des cadres  au Palais  de la République pour faire ce qu’il appelait  « l’inventaire des ressources nationales » du pays. Tous les cadres ainsi invités ont été  installés en une Commission Nationale.      

  En invitant les cadres, le GMR n’a pas fait de différence entre ceux qui représentaient  des organisations de jeunes ou de travailleurs et ceux qui ne représentaient personne, qui ne représentaient qu’eux-mêmes. La salle était  donc  remplie de cadres   prétendument techniques mais qui étaient pour la plupart des cadres politiques de la vision politique de  Emile  Derlin  Zinsou. Les représentants des organisations de travailleurs et de jeunes ont démasqué la supercherie   et ont décidé de ne pas se laisser faire. Ils ne voulaient pas que  le  lendemain  du coup d’Etat du 26 Octobre 1972 ressemble aux lendemains des coups d’Etat précédents où  les profiteurs passaient par  derrière pour s’emparer des victoires des travailleurs. C’est pour cette raison que le 3 Novembre 1972, ces représentants des  organisations progressistes anti-impérialistes, anticolonialistes et anti-néocolonialistes se sont retirés de la Commission installée le 02 Novembre 1972.  Ils se sont installés à la Bourse du Travail pour protester contre les manœuvres des zinsouistes  très nombreux dans la Commission Nationale, des zinsouistes qui pensaient le moment venu pour réinstaller leur leader. Les  représentants des organisations de  travailleurs et de jeunes   ont travaillé tout le weekend parce qu’il s’agissait pour eux de démontrer qu’il y avait  des compétences indéniables en leur sein. 

  Le 6 Novembre 1972, le Gouvernement Militaire Révolutionnaire, effrayé par la détermination des représentants des organisations anti-impérialistes  reprend contact avec eux et décide de les installer en une Commission Nationale Spéciale.

  Le 15 Novembre 1972 les représentants des organisations  anti-impérialistes de jeunes et de travailleurs    remettent les résultats de leurs travaux  au Gouvernement Militaire Révolutionnaire.

  Le 30 Novembre 1972, le Gouvernement Militaire Révolutionnaire proclame par la voix du Président de la République Mathieu Kérékou le DISCOURS PROGRAMME DU 30 Novembre 1972 qui a  pour titre : POUR UNE POLITIQUE NOUVELLE D’INDEPENDANCE NATIONALE. L’essentiel des points contenus  dans le Discours Programme est tiré   des travaux de la Commission Nationale  Spéciale des organisations de  Travailleurs et de Jeunes.   

Je vais   mentionner les noms de quelques-unes de ces organisations qui  ont participé à l’élaboration  de ce chef-d’œuvre des travailleurs et des jeunes de notre pays. 

D’abord les organisations de travailleurs regroupées au sein du  Conseil Syndical  de Coordination et  parmi  lesquelles on peut citer   le Syndicat National des Câbles Postes et Télécommunication  (SYNACAPOSTEL), le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNANTS DU SECONDAIRE ET DU SUPERIEUR (SYNAESS), le Syndicat National des Ingénieurs et Cadres (SYNATINCA), le Syndicat  des Cheminots de  l’Organisation Commune Daho-Niger) (SYNCODANI)Il faut rappeler que les représentants des organisations  anti-impérialistes ont tout fait pour amener à la Commission Nationale Spéciale tous les syndicats même ceux dirigés par  des personnes hostiles aux idées de lutte contre la domination étrangère.

Il y a ensuite les  organisations nationales de jeunes et les organisations  d’élèves et étudiants parmi lesquelles   la LIGUE NATIONALE DE LA JEUNESSE PATRIOTIQUE (LNJP),l’Union Générale des Elèves et  Etudiants du Dahomey(UGEED),  le CERCLE CULTURE ET PROGRES, le Comité Inter-Jeunesse (CIJ).

  Il y a enfin les organisations régionales dont le Rassemblement des Jeunes du Mono, (RAJEUMO), le Front d’Action Commun des Elèves et Etudiants du Nord (FACEEN), FILOGNON d’ABOMEY, SONAGNON de Porto-Novo,  OJSD de DASSA-ZOUME, ODOKOYA de SAVE, OJSP-Z EHOUZOU de ZAGNANADO, AJK de KETOU, SJP POBE et d’autres organisations  de travailleurs et de jeunes dont les noms ne figurent pas ici.

Ce sont ces organisations de travailleurs et de Jeunes de la Commission Nationale Spéciale des Organisations de Travailleurs et de Jeunes qui ont  fait le travail qui a donné le DISCOURS Programme du 30 Novembre 1972, un Discours Programme intitulé : POUR UNE POLITIQUE NOUVELLE D’INDEPENDANCE NATIONALE   

        Le Discours a été un coup de tonnerre dans un ciel ensoleillé. C’est un discours novateur que le peuple attendait depuis des années. Le langage  était nouveau, révolutionnaire, un langage inattendu pour un chef d’Etat. Avant le 30 Novembre 1972, quiconque parlait de lutte contre la domination étrangère, de lutte contre le colonialisme, le néo-colonialisme et l’impérialisme   se retrouvait en prison. Et voilà que le chef de l’Etat donne raison à toutes les forces anti-impérialistes en choisissant leur proposition POUR UNE POLITIQUE NOUVELLE D’INDEPENDANCE NATIONALE. Ce jour a été un   grand jour pour les travailleurs et pour la jeunesse de notre pays. Ce fut le jour du pacte entre les forces anti-impérialistes, anticolonialistes et anti-néocolonialistes et le Gouvernement Militaire  Révolutionnaire, en particulier avec son chef Mathieu Kérékou.  

Comment a-t-il géré ce pacte ?

Je vais  à présent essayer de passer en revue la gestion de ce pacte par Kérékou. Je partirai des extraits du Discours Programme  pour aboutir à ce que j’ai constaté dans leur mise en application.  C’est le résultat qui nous dira si nous pouvons en notre âme et conscience présenter Kérékou à la jeunesse de notre pays comme un modèle.


                       (la suite demain)


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